Les arbres parlent, tout le monde sait ça... mais personne n’écoute vraiment ce qu’ils disent. À moins que... à moins que tout simplement les humains ne comprennent pas le langage des arbres.

Heureusement il existe en ce monde une personne qui possède un don insolite et très rare surtout. Cette personne comprend le langage des arbres et a bien voulu nous traduire ce qu’ils disent. Les arbres ont leur caractère, comme les humains. Certains sont philosophes, d’autres grincheux et colériques, d’autres encore poètes... Ce qui est certain, c’est qu’ils observent tous avec acuité cette variété du vivant qu’on nomme homo sapiens. Et il est fort instructif de nous regarder dans le miroir des arbres. En outre notre interprète-traductrice de l’idiome des arbres a recueilli des témoignages de femmes et d’hommes qui font commerce avec les arbres.


Mawil Huguet

Edition : Le Trouve Feuille, janvier 2024

Genre : contes

ISBN :979-10-424-2363-6

public : tout public

Format : 17X24,4cm

Nombre de pages : 78

livre version papier : 19€

livre version numérique : nc

Juste avant de tourner la page


En décembre 2021, c’était la création du spectacle Histoires racontées par les arbres aux humains capables de les entendre, dans le cadre du festival Opération lumières de La Brède (Gironde)


« Il se dit de celle qui rapporte ces étranges histoires d’arbres qu’elle serait une sorcière... « Un jour, les arbres ont décidé – et je vous parle d’un temps que les moins de trois-mille ans ne peuvent pas connaître – que les humains seraient exclus de la compréhension de leur langue. » La sorcière en question, seule initiée à la langue arboricole par le Doyen des arbres, est envoyée en ambassadrice pour nous rapporter le témoignage d’un platane, un cerisier, un cèdre du Liban et un... arbre mal-nommé. »


Plusieurs spectateurs m’ont demandé si le texte de ce spectacle était édité, ce qui n’était pas le cas. Mais, me suis-je dit alors, pourquoi ne pas compléter ces trois contes par d’autres histoires.

Je suis donc allée consulter mon ami Platane qui habite quelque part (je ne vous dirai pas où) le long du fleuve et lui ai suggéré de me donner des idées.

Il s’est d’abord mis à rire doucement. Puis c’est devenu un fou rire... un vrai fou rire de platane. Vous avez déjà entendu un arbre rire ? C’est très doux d’abord puis ça prend tout l’espace et ça vous enveloppe comme un châle de laine très chaud.

Mais brusquement mon ami est passé du rire à la colère. « Comment ? Tu me demandes de te suggérer des histoires à raconter à des humains qui sont incapables de lever la tête vers une canopée plus de quinze secondes d’affilée, qui sabotent plus qu’à leur tour la nature qui les entoure, les fait vivre et... »

Bref il n’était pas content du tout, mon ami Platane et j’ai cru sur l’instant qu’il allait rompre notre amitié qui date pourtant de plus de vingt ans. J’ai balbutié des excuses, ai tenté de lui expliquer qu’en fait, ce que je voulais dire, c’était qu’on ne publie pas un livre avec trois malheureuses histoires et...

« ... oui malheureuses, tu peux dire malheureuses, ça, c’est exact. Sans compter le gaspillage de papier pour écrire des sornettes... et il vient d’où le papier ? Hum ? »

Alors là, c’est moi qui me suis fâchée pour le coup ! J’ai fait remarquer à mon ami qu’il me répète depuis des années qu’il faudrait que les humains réalisent le massacre qu’ils font avec les forêts, les animaux, les oiseaux... et c’est même lui qui m’avait encouragée à créer le spectacle que nous avons présenté l’an dernier pour témoigner de l’hécatombe à venir, et c’est encore lui qui m’avait d’abord demandé de raconter l’histoire du platane et du cerisier et puis qui m’avait envoyé visiter son pote Cèdre du Liban qui était en colère contre les humains et qui voulait que je témoigne, et puis...

Bref. J’étais froissée. Offusquée même on peut dire devant ce manque de reconnaissance de mes efforts accomplis et la mauvaise foi de mon ami Platane aussi.

Bon, je me suis assise à son pied.

Et j’ai boudé. Mais vraiment boudé.

J’ai sorti mon petit calepin où j’avais déjà écrit les trois contes du spectacle et tout en griffonnant, j’ai attendu que Monsieur Platane décolère.

En fait mon ami est un peu soupe au lait et très vite il s’est calmé en sentant mon dos contre son écorce.

Et je n’ai eu qu’à patienter, le temps que notre brouille se dilue dans le doux bruit du fleuve, avant qu’il ne me suggère (toujours un peu ronchon quand même !) quelques idées.

Voilà. Vous pouvez tourner la page.

Marwil Huguet             l'être de l'arbre à l'homme